Lot 116
Raymond HAINS, Jacques de LA VILLEGLE et Camille BRYEN, Hépérile éclaté, 1953. Petit in-12 carré...
Raymond HAINS, Jacques de LA VILLEGLE et Camille BRYEN, Hépérile éclaté, 1953. Petit in-12 carré broché. L'un des 300 exemplaires "conformes à la maquette". Avec sa bande et son tract préface.
Provenance :
- Don de l'artiste à ses vieux amis Marguerite et Charles Raffray.
- Par descendance, maison de Saint-Brieuc.
Raymond HAINS (Saint-Brieuc, 1926 - Paris, 2005)
"La Javanaise aux dents blanches", 1948.
Tirage argentique contrecollé sur carton. Signé et daté en bas à droite.
Hauteur : 31,4 cm. Largeur : 23,1 cm.
Provenance :
- Don de l'artiste à ses vieux amis Marguerite et Charles Raffray.
- Par descendance, maison de Saint-Brieuc.
"Raymond, vous ne savez pas dessiner !"
Le petit Raymond a douze ans lorsqu'il entend cette phrase pour la première fois. La première critique de sa création artistique : lapidaire, sans appel. Et c'est sa prof' de dessin qui le lui dit. Marguerite Raffray (1907-2004) enseigne au lycée Anatole Le Braz, à Saint-Brieuc. En cette année 1938, elle a dans sa classe Raymond Hains, et il est nul en dessin. Quel impact une telle sentence peut-elle bien avoir dans l'esprit d'un jeune garçon qui croise le fer pour la première fois avec l'Art ? En 1960, lorsque Pierre Restany publie le "Manifeste des Nouveaux Réalistes", Hains l'embrasse dans son entier.
Point de jugement hâtif ! Il a tout de même fait les Beaux-Arts de Rennes... Pendant presque six mois ! Il expose ses photographies hypnagogiques pour la première fois chez Colette Allendy en 1948.
L'année suivante, il arrache sa première affiche et explique sa démarche : "Comme je n'avais pas envie qu'elles disparaissent, je les ai emportées pour les accrocher au mur de ma chambre". Dans les faits, sa chambre en était complètement encombrée. Il racontait lui-même à la famille Raffray comment il devait se frayer un passage dans cette jungle pour accéder à son lit. Et de poursuivre "Comme je prenais des affiches conçues et imprimées par d'autres, et (...) déchirées par des inconnus, mon premier mouvement n'était pas de dire "je vais les signer". Je me contentais de sauver des échantillons.".
Imaginez donc la surprise de Madame Raffray, en 1985, lorsque son ancien élève "qui ne sait toujours dessiner" lui en offre une, et qui plus est de plus d'un mètre sur un mètre ! Grande; certainement aussi grande que celle de Charles Raffray (1905-1985), professeur de lettres classiques au Lycée Anatole Le Braz de Saint-Brieuc, lorsqu'il s'est vu offrir par le même énergumène "Hépérile éclaté"... Le livre fut rangé entre les métamorphoses d'Apulée et La Technique de la peinture à l'huile de Xavier de Langlais. Quant à l'affiche, elle ne sera décrochée du mur du salon que cet hiver pour vous être présentée ici.
Raymond Hains aimait le pays qui l'a vu naître et il aimait son professeur de dessin. Lorsqu'il revenait en Bretagne pour embrasser ses proches, il ne manquait jamais de faire une visite aux Raffray. Il apportait dans ses valises des milliers d'anecdotes sur le milieu artistique parisien complètement déjanté; des calembours ad nauseam et des brassées d'affection. "Quelle fête c'était !" se souvient un membre de la famille.
Alors non, à douze ans Raymond Hains ne savait pas dessiner et il n'a probablement jamais appris. Mais Marguerite Raffray avait vu en lui un Artiste. Et toute sa vie, à travers cette puissante et inexplicable amitié, elle n'a jamais cessé de le soutenir. Voilà peut-être comment un monstre de l'Art d'après-guerre a pu porter un peu de Saint-Brieuc-les-Choux dans les plus grandes collections et institutions tant françaises qu'internationales.
Ce sont leurs souvenirs que nous dispersons aujourd'hui.
Adjugé : 650 €