Saint-Brieuc : vendues aux enchères, les pierres des Bénédictines ont connu 339 ans d’histoire

Mardi 16 Juillet 2024 à 06h
Le 29 juin dernier, le commissaire-priseur Karl Benz soumettait aux enchères, au château de Quintin, un ensemble de pierres de granite. Une vente loin d’être anodine, puisque celles-ci avaient traversé plus de trois siècles d’histoire de Saint-Brieuc, donnant son nom à la rue Saint-Benoît.

Mis aux enchères à 5 000 €, les pierres et piliers permettant de reconstituer une partie du cloître des Bénédictines du Calvaire de Saint-Brieuc (1625-1626) sont finalement partis à 19 000 €.


« Adjugé 19 000 € ! » En ce 29 juin 2024, la vente Florilège vient de voir partir un lot de 300 pierres de taille, vingt piliers et trente pierres d’entablement. Le commissaire-priseur Karl Benz est heureux : l’ensemble permettant de reconstituer des arcades en plein cintre, issues d’un cloître briochin, est sauvé. Une seconde fois !

Depuis 2000, afin d’éviter l’éparpillement des piliers et pierres d’arcades, un amoureux du patrimoine les avaient acquis et stockés en Centre-Bretagne. (Karl Benz)


Un cloître des Bénédictines, datant du XVIIe siècle

Remontons le temps. Nous sommes en 1625. L’évêque André Le Porc de la Porte autorise l’implantation d’un monastère des Bénédictines - Dames du Calvaire, sur les Champs-Chevillons, en la bonne cité de Saint-Brieuc-des-Vaux. Ces Champs représentent un ensemble de parcelles, délimitées aujourd’hui par l’allée et l’avenue des Promenades, la rue Saint-Guillaume et la rue…. Saint-Benoît, forcément.

Comme le montre un plan du début du XVIIe, la congrégation va y ériger bâtiments et chapelle. Et, bien visible sur un plan de la ville, fait en 1812 par Vautherin, officier du 2e régiment léger, un cloître. Dont sont issues les fameuses pierres.

Tribunal sous la terreur

Mais entre-temps, la Révolution est passée par là. Le site abritera le tribunal de la Terreur en 1793-1794, puis un tribunal (au moins jusqu’en 1876), mais aussi une manutention militaire (toujours là sur un plan de 1905).

En 1849, c’est l’école Saint-Charles, nouvellement créée, qui s’implante dans l’enclos qui sera vendu, en 1853, aux Dames du Sacré-Coeur de Paris, pour en faire un pensionnat. L’école du Sacré-Coeur y verra le jour en 1928, jusqu’à ce qu’un incendie embrase classes, dortoirs et chapelle en 1956.

Lors de de leur démontage, soigneux dirigé par l’architecte André Le Méhauté, en 1964, treize arcades avaient trouvé place sur un bâtiment de La Motte-à-Madame, derrière la basilique de la rue Saint-Pierre.


Stockées dans un terrain vague

Le cloître, qui a notamment servi de salle de cinéma et de sport, est encore sauf. La Ville de Saint-Brieuc souhaitant construire une salle de sport, le fait démonter en 1964. Une partie des arcades est utilisée pour un bâtiment sur La Motte-à-Madame, derrière la basilique Notre-Dame-d’Espérance (côte Saint-Pierre). Le reste finit dans un terrain vague, durant 36 ans, avant une mise aux enchères en 2000. Refusant de voir le lot morcelé, un amoureux local du patrimoine acquerra le tout… remis aux enchères 24 ans après, à Quintin. 339 ans se sont écoulés, et les arcades du cloître vont revivre, « en Bretagne-Nord, sur le domaine d’un manoir en rénovation », se réjouit Karl Benz.
Karl Benz
Commissaire-priseur
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